« Ah ! Qu’elle était jolie la petite poule de Valérie. Qu’elle était jolie avec ses yeux doux, son barbillon de sous-officier, ses pattes roses et luisantes, sa crête rouge sang et ses douces plumes blanches qui lui faisaient un derrière à faire se damner les coqs alentours.

 

Valérie avait devant sa maison un long chemin bordé d’aubépines, de laurier, de giroflées, de bruyère et d’herbe fraiche.

Un jour la petite poule blanche se dit : « Comme on doit être bien là-bas ! Quel plaisir de gambader vers la mer ! »

 

Effrontée et téméraire la petite poule blanche s’aventura sur le chemin, suivie de loin par ses trois compères, très fidèles mais moins gaillardes. Elles picoraient paisiblement l’herbe sauvage au goût de liberté.

 

Tout à coup le vent fraîchit. Les quatre poulettes relevèrent le bec et virent dans l’ombre deux oreilles courtes, toute droites, avec deux yeux qui reluisaient. 

C’était un chien.

Énorme, immobile, il était là, regardant la poulette blanche et la dégustant par avance. Sans plus attendre il se jeta sur elle et l’emmena vers le marais voisin. La petite poule blanche se débattit de toutes ses forces, caqueta de son timbre le plus aigu, encouragées par ses trois compères vouées à faire masse face au monstre. 

 

Fût-ce un sifflement, un bruit suspect ? La bête s’enfuit laissant la petite poule blanche abattue, choquée, traumatisée mais vivante ! 

Elle remonta doucement le chemin précédée de ses trois amies et attendit le retour de sa maitresse qui découvrit avec effroi les plumes duveteuses vers le marais. 

La petite poule blanche demeura prostrée plusieurs heures ayant perdu, outre des plumes, le réflexe de picorer. Valérie passa la journée à ses côtés, la câlinant, la caressant, heureuse de retrouver peu à peu une poulette docile et aimante.

 

« Sache-le ma chère poulette, là où tu es l’herbe est déjà bien verte. »